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Saisonniers en Aquitaine : à qui profite le tourisme ?

Serveurs, hôtesses, réceptionnistes ou pisteurs… L’Aquitaine, cinquième région touristique de France, emploie chaque année des milliers de travailleurs saisonniers. Qui sont-ils ? D’où viennent-ils ? Pour la plupart recrutés localement, étudiants et professionnels du tourisme ne sont pas égaux face à l’emploi : la fin de saison est synonyme de retour aux études pour les uns, de chômage pour les autres. Le tourisme, pôle économique de la région, maintient aussi une partie de sa population dans la précarité.

Olivier, saisonnier du tourisme depuis plus de vingt ans, vit à Gujan-Mestras, sur le Bassin d’Arcachon. Serveur depuis début avril dans un café de bord de plage, il fait partie des milliers de saisonniers locaux qui travaillent chaque année sur le littoral aquitain.

D’où viennent les saisonniers ?
Comme Olivier, la majorité des saisonniers vivent à moins de 20 km de leur lieu de travail. Le tourisme s’organise autour de trois principales zones : le littoral, le Pays basque et le Périgord noir.

Lorsqu’ils ne sont pas locaux, les saisonniers viennent de loin – plus de 100 km – et de deux régions principalement : Midi-Pyrénées et Île-de-France.

Qui sont-ils ?
Le travail saisonnier cache une réalité diverse. Les professionnels du tourisme sont embauchés dès le début de la saison, en avril. Le recrutement des étudiants se fait plus tard et varie en fonction de la fréquentation touristique. Ils servent de variable d’ajustement. La précarité financière n’est donc pas la même d’une catégorie à l’autre. « Pour les étudiants, le job d’été, c’est de l’argent de poche pour le reste de l’année », note Florence Samson, en charge des saisonniers à la Maison de l’emploi de Bayonne. Les professionnels, eux, vivent du tourisme.

Saisonnier, travailleur précaire ?
La précarité de l’emploi vient à la fois du niveau de rémunération et de la durée des contrats, uniques et courts, et parfois à temps partiel. La durée de contrat varie en fonction de la longueur de la période touristique. Dans le Périgord noir, par exemple, la saison débute plus tôt que dans le Pays basque.

Un tiers des saisonniers sont en activité les deux mois précédant ou suivant la saison mais neuf sur dix ne signent qu’un seul contrat dans l’année.

« L’hébergement, le gros point noir du secteur »
Le parc locatif est loin d’être extensible. « C’est un problème qui rend difficile la venue de saisonniers étrangers », explique Laure Trecu, chargée d’accueil de la plate-forme Nomad’, qui gère l’emploi et l’hébergement des saisonniers sur le littoral landais. En camping ou en auberge de jeunesse, les saisonniers privilégient les logements les moins onéreux. La solution vient parfois de l’employeur lui-même. « La Maison des saisonniers propose aussi de mettre en contact des particuliers et des saisonniers », précise Dominique Seurin, gérant d’un restaurant de bord de plage à Arcachon. « À la montagne, les saisonniers sont logés plus facilement, mais dans des conditions minables », ajoute t-il. « Même pour mon chien, j’en aurais pas voulu. »


La pénurie de logements, encore plus aigue au Pays basque, est un frein à la venue de saisonniers non résidents. Autre facteur : les difficultés de déplacement. Les transports en commun ne sont pas présents sur toute la zone Pays basque et se déplacer en voiture pendant la période touristique relève de l’exploit. La forte identité régionale du Pays basque explique aussi sûrement que le recrutement local y soit davantage favorisé qu’ailleurs en Aquitaine.

Que deviennent les saisonniers à la fin de la saison ?
Certains saisonniers utilisent l’activité touristique autant qu’ils la subissent. Elle leur permet d’accumuler des revenus pour vivre de leur travail de saisonnier toute l’année «mais aussi de prolonger leurs droits aux allocations chômage », note Florence Samson. Dans le même temps, l’activité touristique les maintient dans une situation professionnelle précaire, sans perspective de promotion ni de hausse de rémunération.
Pour les professionnels du tourisme, comme Olivier, la fin de la saison sonne le départ vers d’autres zones touristiques, où ils trouveront de nouveaux emplois. Ils acceptent l’instabilité financière, temporaire et géographique inhérente à leur statut. La situation la plus précaire concerne ceux qui ne sont pas mobiles et qui renoncent de ce fait à un revenu régulier.
Olivier revendique ce mode de vie : « ça permet de voyager, de découvrir de nouvelles cultures et donc de s’enrichir ». Après Arcachon, le serveur aux multiples fonctions partira sans doute à la montagne ou à l’étranger : « Je ne sais pas encore où, mais ça ne me fait pas peur ».

Nicolas Dumas, Maria Laforcade, Adèle Latour

Vous pouvez encore consulter les sites du datajournalismelab de 2013 et de 2012. Outre les productions des étudiants, vous y trouverez des documents visant à partager les expériences et la réflexion des nombreux acteurs de ce laboratoire autour d’un modus operandi de la formation au datajournalisme.